
arre à tribord. A deux semaines du scrutin européen du 7 juin, Nicolas Sarkozy, après s’être exprimé en début de campagne dans une posture républicaine, choisit de réinvestir deux thématiques payantes : la sécurité et l’immigration. Le chef de l’Etat, face au risque abstentionniste, entend solidifier l’avance de son parti, placé en tête des sondages.
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L’UMP, dont il est resté le chef incontesté, s’apprête, jeudi 28 mai à Lille, lors d’un meeting national, à jeter l’hameçon. Les orateurs de l’UMP vanteront le pacte européen sur l’immigration négocié par l’ancien ministre de l’immigration et de l’identité nationale, Brice Hortefeux. Son successeur, Eric Besson, entré à la direction de l’UMP, ne figure pas, pour l’heure, parmi les intervenants.
Le lieu ne tient pas du hasard. La ville est la patrie de Martine Aubry et se situe dans la même circonscription que Calais et Sangatte où convergent les candidats à l’immigration vers la Grande-Bretagne. Dans cette euro-circonscription du Nord-Ouest, l’UMP espère bien conserver les voix des électeurs du Front national, pêchées dans le filet de l’élection présidentielle. Sur l’immigration, l’Elysée dispose d’études d’opinion qui montrent que cette question reste un thème « clivant » qui « parle » à l’électorat populaire.
Le même jour, le président de la République aura, dans la matinée, à l’Elysée, réuni les principaux acteurs de la sécurité, de la chaîne pénale et de l’éducation nationale.
Ce nouveau changement stratégique a été arrêté, lundi et mardi à l’Elysée, lors de deux réunions avec les dirigeants du parti majoritaire. Le chef de l’Etat leur a expliqué qu’il souhaitait que le parti continue de parler d’Europe pour creuser l’écart avec le MoDem et le PS tout en se saisissant de l’actualité – l’attaque d’un fourgon de police à l’arme de guerre à la Courneuve, les violences à l’école et l’arrivée d’immigrants aux portes de l’Europe – pour réintroduire la sécurité et l’immigration dans la campagne.
M. Sarkozy a l’habitude d’user de ces thématiques à chaque veille d’élection. Lors de la présidentielle de 2007, conseillé par l’ancien journaliste de Valeurs Actuelles, Patrick Buisson, devenu son conseiller, le candidat de l’UMP avait dans les derniers jours de la campagne choisi de droitiser sa campagne, en proposant la création du ministère de l’immigration et de l’identité nationale.
En avril 2006, alors ministre de l’intérieur de Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy, distancé dans les sondages par Ségolène Royal, avait brutalement durci son discours pour parler à l’oreille des électeurs du Front national. « S’il y en a que cela gêne d’être en France, qu’ils ne se gênent pas pour quitter un pays qu’ils n’aiment pas. (…) On a plus qu’assez d’avoir le sentiment d’être obligé de s’excuser d’être français », avait-t-il déclaré.
« Dans les campagnes, c’est une tendance naturelle. Il faut des thématiques fortes, sinon les gens ne se sentent pas concernés. Cela vaut aussi bien sur l’immigration que sur l’environnement », explique sans fard Franck Louvrier, le conseiller en communication du président de la République. « Les fondamentaux sont les domaines régaliens : justice, sécurité, immigration. C’est là dessus que les électeurs se déterminent. Le reste, l’économie, c’est mondialisé », commente l’ancien ministre de l’immigration Brice Hortefeux devenu ministre du travail.
Officiellement, le chef de l’Etat n’envisage pas de s’impliquer personnellement, pour laisser le débat entre les partis émerger, les clivages s’installer. « Le pacte sur l’immigration est un grand succès de la présidence française dont on a très peu parlé, explique M. Louvrier. Brice Hortefeux est arrivé à regrouper l’ensemble des pays européens. Lorsque Nicolas Sarkozy était ministre de l’intérieur, les socialistes espagnols et italiens n’étaient pas sur la même ligne. C’est une belle réussite française et européenne. » L’objectif est double : montrer que la France sarkozienne a une position médiane en Europe – M. Sarkozy s’est réjoui des propos durs de Silvio Berlusconi sur l’immigration qui lui permettent d’apparaître moins droitier. Et démonter que les socialistes français sont isolés dans leur propre famille politique en Europe sur les sujets de l’immigration et de l’adhésion de la Turquie. « Nous voulons montrer que voter socialiste n’est pas utile », explique Michel Barnier.
M. Sarkozy ne juge plus opportun d’intervenir directement, sauf avec la chancelière allemande Angela Merkel pour publier une lettre commune qui dessinerait l’Europe politique de demain. Problème : Mme Merkel souhaite la publier avant les élections pour doper la campagne européenne, qui seront un test avant les législatives de septembre. M. Sarkozy estime, lui, qu’il n’y a pas d’urgence et préférait attendre que les échéances électorales soient passées. Les deux dirigeants trancheront l’affaire en début de semaine lors d’un entretien téléphonique.
Sophie Landrin et Arnaud Leparmentier





